Interview - Mila Fürstová Pt.2

En avance de l'exposition, nous avons appelé Mila pour en savoir plus sur son travail.

Avez-vous déjà eu autant d'exposition sur vos œuvres, dans des revues et des affiches ?
Un peu. Pas sur des affiches par contre. Il y avait beaucoup de panneaux d'affichages un peu partout, mais quelques semaines avant la sortie de l'album, j'ai donné naissance à mon deuxième enfant. Elle a du être emmenée en urgence à l’hôpital et j'ai eu une belle frayeur. Donc je n'avais vu aucun panneau en vrai. J'étais bien trop occupée à nettoyer le caca de mon enfant. Mes amis à travers le monde me disaient que mon travail était affiché partout, et je regardais mon ordinateur couvert de caca. Mais j'étais bien sûr vraiment très heureuse. C'était un bon moment.

Les panneaux étaient géniaux, je vous enverrais des photos.
Oh vous pouvez ? Pour moi, tout ça aurait très bien pu être une blague, comme le Truman Show, parce que j'étais renfermée dans mon monde, dévouée à mes bébés. Je n'ai rien vu de tout ça.

Les artistes n'ont pas souvent l'occasion de se rapprocher à ce point avec le public. Des millions de personnes ont vu vos œuvres et les ont détaillés. Cela doit être un sentiment fou.Oh totalement. J'ai vraiment adoré. Mon travail est quelque chose d'intime, alors de le mettre à la vue de tout le monde... vous savez mon travail est comme un chuchotement et d'un coup, vous faites évoluer ce chuchotement et des personnes écoutent ce chuchotement, ce qui est un grande réussite.

Et qu'avez vous pensé des animations de l'artwork ?
Oh, les personnes qui ont fait ça sont des génies. Phil ne m'avait pas parlé de l'animation et je pense qu'il voulait me surprendre, à l'approche de mon anniversaire. Et puis c'est sorti et je ne pouvais m'arrêter de pleurer, je ne pouvais pas y croire. Et plus tard, j'ai réalisé que beaucoup de gens avaient pleuré aussi – c'était un gros travail pour les pauvres animateurs. Donc tout mon amour du travail et le plaisir que j'ai eu a mené à de grandes souffrances pour les personnes qui devaient passer derrière moi.

C'est tellement bien fait.
Ils sont géniaux. Ce que je pense qu'ils ont fait à la perfection est qu'ils ont réussi à garder ce sentiment poétique sur toute l'oeuvre. Ils l'ont fait tellement sensiblement. Et ils ont emmené certains des personnages plus loin.

Etiez-vous fan de Coldplay bien avant tout ça ?
Oui je l'étais. Je ne suis jamais allée à un de leurs concert ou porté un de leur t-shirt, mais j'avais écouté leur musique et toujours aimé. Il y a eu un moment dans ma vie où des choses très difficiles me sont arrivées et une de leur chanson m'a vraiment aidé. Cela a été comme un signe. C'était une des raisons pour laquelle j'ai été aussi surprise quand Fraser m'a appelé pour me dire que c'était pour Coldplay. Cela aurait très bien pu être quelqu'un d'autre. Mais j'avais ce fameux lien depuis 2009. Ce fut comme un message envoyé du paradis.

Comment êtes-vous devenu artiste ?
Je suis née en Tchécoslovaquie communiste et dans les pays communistes, les gens essayaient de trouver du talent chez leurs enfants très tôt. C'est donc à l'école maternelle quand les chercheurs de talents sont venus et qu'ils ont dit « Oh elle devrait faire de l'art ou de la danse ». Mes parents m'ont fait faire les deux. A la danse, je pleurais car ma mère me manquait. Mais quand je peignais, je l'oubliais. J'étais totalement investie. Je dessinais tout le temps. Je grandissais dans un pays fermé. On nous disait à l'école que nous ne pourrions jamais partir. Qu'on ne verrait jamais l'Italie ou autre. Le dessin est devenu un échappatoire pour moi.

Donc finalement, les chercheurs de talent ont fait du bon boulot.
Oui. Quand j'avais 14 ans, je suis allée en écolé privée qui était comme une école d'art à Prague. Et quand j'ai eu 18 ans, je voulais entrer à l'académie des Arts mais ils m'ont refusé. Ils ne pensaient pas que j'avais du talent. Je suis donc allée au Royaume-Uni où j'ai eu de meilleures opportunités. J'ai finalement étudié à l'université des Arts. Mais même là-bas, j'ai subi de grandes déceptions car il y a beaucoup de nouveautés dans les beaux arts et mon travail n'était pas considéré comme assez conceptuel. Comme « Pourquoi tu dessines ? Pourquoi tu ne fais pas quelque chose de plus sensé ? » mais pour moi, c'etait mon monde et je voulais dessiner.

Y'a-t-il eu des retours de votre exposition  « Ghost Stories » en République Tchèque ?
Oui et cela a été extraordinaire. D'un côté, ils m'ont un peu rejetée, puis Coldplay et leur divinité me sont tombés dessus et soudainement je suis devenue leur héroinee. Je suis vraiment heureuse mais je garde les pieds sur terre car cela arrive à l'étranger. Il y a eu beaucoup d'articles sur moi, je suis passée à la TV et j'ai gagné certains prix !

Vous avez eu une année incroyable.
Oui tout à fait. Cela m'a aidé à evoluer en tant qu'artiste et en tant qu'être humain. Sur un plan personnel, j'ai adoré rencontrer le groupe. Non seulement ils sont des musiciens extraordinaires, mais ils sont humainement gentils et bienveillants. Les gens disent que la violence engendre la violence, mais je pense aussi que la gentillesse engendre la gentillesse. Ils sont comme ça et je respecte ça. Cela m'a beaucoup inspiré.

Cela vous a-t-il ouvert des portes ?
Oui je crois. Des personnes m'ont approché. Mais je ne veux pas devenir omniprésente. Je voudrais continuer à faire mon propre travail et peut-être faire certains projets dans lesquels je m'investis. Mais je ne pense pas refaire quelque chose comme ce que j'ai pu faire pour Coldplay. Certains groupes m'ont tout de suite contacté après, et j'ai considéré ça comme de l'infidélité. J'ai dis « non je ne peux pas faire ça. Je veux faire autre chose. »

Etes-vous allée à certains concerts ?
Oui ils m'ont gentiment invités à celui au Royal Albert Hall. C'est là où j'ai obtenu mon diplôme il y a 10 ans, et d'un coup j'ai pu voir mes œuvres au plafond. Considérant là d'où je viens, je n'en revenais pas.

Et vous avez participez à leur traditionnel petit rassemblement de pré-concert !
Oui et je n'en revenais toujours pas ! En fait je crois que je pinçais Phil ! Mais toute l'équipe m'a accueilli à bras ouverts et m'ont traité avec respect et gentillesse.

L'exposition est sur le point d'ouvrir. Etes-vous excitée ?
Oh oui je le suis vraiment. Il y aura plus de 100 œuvres avec tous les croquis. Avec « Magic » il y avait juste 3 croquis, mais quand je suis arrivé à True Love (comme c'etait un sujet sensible), soudain il y avait 30 croquis. J'avais un soucis pour dessiner le cœur, je ne voulais pas le faire trop niais.

Cela s'est avéré être super !
Merci. C'était le dessin le plus difficile à faire. Il y avait presque deux versions complètes que Chris, à la derniere minute, ne voulait plus. Mais je suis très heureuse du résultat final.

C'est génial de soulever des fonds pour Kids Company à travers l'exposition.
Je sais, c'est la meilleure des choses. Je ne suis pas habituée à ce que l'art est un tel pouvoir. Et je pense que cela peut engendrer de bonnes choses. J'ai toujours été si chanceuse d'avoir de l'amour autout de moi grâce à mes parents. Si cet argent peut aider à montrer que ces enfants sont aimés, c'est un tel pouvoir !

Et les fans voyagent de partout dans le monde pour voir l'exposition.
Je sais ! Mais ils viennent principalement voir Coldplay.

Je ne suis pas sur qu'ils resteront là tout le temps.
Oh vraiment ? Je croyais ! Haha mais non, c'est incroyable de penser que des gens viennent voir mon travail.

La dernière question , que je pose à tout le monde, quelle est votre chanson préférée ?
Ok. J'en ai 3 : Viva La vida, car c'est le fameux souvenir de 2009 dont je vous parlais. Puis, A Sky Full of Stars car j'ai senti que Chris chantait quelque chose à laquelle j'ai pensé toute ma vie. Je pense que j'ai dessiné ce que Chris chantait, c'est à dire regarder l'univers et se voir. Et puis j'aime O, avec les oiseaux. Il y a juste quelque chose d'apaisant à propos de cette chanson. Il y a une tristesse et en même temps une gaieté. C'est sublime.